Voici en intégralité et découpé par chapitre pour plus de facilité de lecture, un ouvrage que j'ai écrit en 2010 sur le phénomène du camping en France, entre camping et précarité.
Avec plus d'un million et demi de véhicules de loisirs vendus depuis la seconde guerre mondiale, le secteur du camping est toujours sur une courbe ascendante. Le succès de cette pratique, qui permet aux citadins d'accéder à des activités de plein air, est particulièrement français. En effet, nulle part ailleurs en Europe ou dans le monde, le camping n'a autant, et continue toujours, à refléter les évolutions de la société. Ainsi, la compréhension de ce phénomène social fournit des clés pour appréhender le fonctionnement de la société dans son ensemble.
Ce miroir sociétal possède aujourd'hui deux visages.
Le premier est celui du loisir, créant des espaces permettant au plus grand nombre de prendre des vacances à petits prix, de dépasser les différences sociales et, de manière inattendue, de rechercher hors les murs la promiscuité rejetée en ville. L'étude du siècle dernier est possible grâce au camping car toutes les innovations, toutes les évolutions sociales ont trouvé leur place dans cette pratique. Cela la rend encore bien plus importante que ne pourrait le laisser croire son statut de premier mode d'hébergement pour les vacances des Français.
Le mythe du camping est né dans les années 1920, s'est renforcé avant-guerre et s'est pleinement concrétisé grâce à la motorisation accrue des ménages après 1950 qui a permis de partir plus souvent en vacances. Quelles sont aujourd'hui les formes de cette pratique de loisir en perpétuel renouvellement ? Comment les campeurs ont-ils fait évoluer leurs habitats ? Quels impacts sur le territoire sont en passe d'être générés ?
Le second est celui de la précarité, lorsque les petits habitats de loisirs deviennent des lieux de vie à l'année.
Caravanes, mobile homes et camping-cars servent alors parfois d'habitat pour tous ceux et toutes celles qui, en situation de précarité, n'arrivent pas à trouver un logement classique. Et le camping disparaît alors, puisqu'il est intrinsèquement lié à la question du loisir. Surgit alors une nouvelle pratique sans nom, sans recensement et sans reconnaissance. Cette progression de la précarité qui trouve un réceptacle dans et hors des terrains de camping alerte sur l'apparition de phénomènes liés à la pression foncière et immobilière actuelle. Est-il possible de faire perdurer la vocation touristique du camping tout en hébergeant les personnes qui ne sont pas là pour les loisirs ?
Pour répondre à ces questions, cet ouvrage se propose de parcourir la diversité des usages liés aux habitats de plein air -tentes, caravanes, mobile homes ou camping-cars- et des lieux qu'ils occupent plus ou moins temporairement en empruntant le chemin allant du plus mobile et luxueux au plus sédentaire et nomade.